Worlds Collide △

WORLDS COLLIDE

ft. As de Trèfle

L

es murmures montent, et montent dans les herbes folles, enflent jusqu’à parvenir aux oreilles du félin. La démarche allongée, le pas assuré, le regard presque vide, Cri du Loup avançait, sans vraiment but précis. Il avait juste besoin de s’aérer la tête, de se vider les idées.
Il avait ce besoin inexplicable de mieux se retrouver pour mieux partager. C’était comme si tout s’emmêlait ces derniers temps. Son esprit se tortillait dans sa tête, semblant à tout pris vouloir s’échapper, et cela sans aucune raison pour le moins connue. Il ne se sentait pas abattu, oh non, loin de là. Il se sentait vivant, presque parfois trop. Un souffle de vie insufflé par des forces supérieures, le rendant parfois trop plein de vitalité. Il avait ce besoin inexplicable de tout maîtriser, que tout progresse à la vitesse de l’éclair. À vrai dire, sa patience pourtant si irréprochable venait à changer. Il s’en inquiétait un peu, il faut l’avouer, lui qui avait toujours cette force tranquille, digne de bon sens et de tranquillité.
Il perdait patience lorsqu’on le questionnait, il perdait patience lorsqu’il entendait des chatons se chamailler, il perdait patience lorsque deux apprentis parlaient de ce qu’ils allaient bien pouvoir manger en rentrant de l’entraînement, il perdait patience lorsqu’on le dévisageait. Il faut dire que le chat n’aimait pas être regarder. Cette peur perpétuelle du jugement caché dans le regard de celui qui t’observe. Rien de plus déplaisant. Cri du Loup avait donc besoin de cette petite pause sans doute bien méritée.

Le cœur emballé, il permis à ses pattes de le porter, presque en courant, jusqu’à l’Arbre aux Miracles. Que cette liberté faisait du bien, l’esprit libéré. Le museau en l’air, il s’autorisa à jeter quelques coups d’œil dans les branchages haut placés. Parfois, il aimerait vraiment pour voler, décoller de ce sol poussiéreux, pour rejoindre ce ciel si bleu. Les arbres commençaient tout juste à porter leurs bourgeons, quelques feuilles vertes apparaissaient. Il était certain, le beau temps arrivait, malgré ce petit vent toujours frais.
Soudain, dans les broussailles, quelque chose s’affairait, des gratouillis accompagnés de marmonnements. Qui cela pouvait bien être ? Le coin était parfois prisés pour ces quelques rongeurs alléchants, mais il faut dire que ce n’est pas en créant un bruit pareil que le félin allait pouvoir attraper quelque chose… Le matou gris s’approcha prudemment. Pourvu que ce ne soit pas un solitaire, mais l’odeur lui semblait familière. Ce mélange amer de plantes, de gibier rance et de litière de mousse. Il n’y avait pas de doute, c’était As de Trèfle, notre guérisseur.

Cri du Loup s’avanca alors vers lui, le pas beaucoup plus assuré, les oreilles légèrement pointées vers l’avant, prêt à l’accoster. À vrai dire, il ne l’avait jamais vraiment adressé la parole, leurs mots échangés restaient brefs et distants. En même temps, les deux mâles n’avaient pas la réputation d’être des grands bavards. Mais aujourd’hui, notre chat gris avait décidé de faire un effort, alors c’est avec enjouement qu’il lança finalement :

— Hé ! Belle journée, n’est-ce pas ?